Cher Monsieur D.,
Voilà 6 mois que nous partageons un dossier tout ce qu'il y a de plus administratif, puisqu'il s'agit de la retraite de ma belle-mère. Vous ne mesurez pas, j'en suis sûre, la chance que vous avez, de ne pas avoir dû gérer ce dossier avec Dame Belle-Doche en question, tant vous auriez pleuré de ne jamais pouvoir le passer dans la pile des "terminés - à archiver".
Sachez que je dois avoir au moins 2 gènes tordus, le premier étant de ne craindre aucun document administratif, le 2e, d'accepter d'aider la cause perdue de la principale intéressée.
Vous, vous n'avez pas dû la questionner pendant 90 minutes sur son emploi du temps de 1963, à rechercher sur Internet les faits marquants de cette année-là pour tenter de la resituer un tant soit peu. Vous, vous avez échappé à sa vie miséreuse qu'elle a oublié depuis longtemps et à ses larmes, signe que je remuais une époque dont elle avait préféré occulter le goût trop amer.
Vous, vous n'imaginez pas un instant le stress que lui occasionne un coup de fil à l'étranger.
Il est vrai, cher Monsieur D., qu'on vous imagine aisément installé derrière 5 ordinateurs reliés, sinon entre eux, à un méga-serveur certainement situé sur Mars, pour me faire patienter 20 minutes entre chaque requête et devoir vous reconnecter à chaque vérification. Au n°11 de la rue Vauban, c'est certainement un gratte-ciel qui se dresse dans cette ville française de province, tant il est compliqué d'effectuer un changement d'adresse. Vos collègues du service paiements, vous savez, ceux qui ont sorti une ancienne adresse du carton et adressé un courrier à une femme divorcée sous son nom d'épouse et qui s'étonnent aujourd'hui de ne pas avoir reçu de réponse, dites, vos collègues, ils ont des ordinateurs qui dépendent de serveurs différents des vôtres ?
Et puis, cher Monsieur D., quand au bout de 35 minutes de recherches intenses, vous avez pu mettre le doigt sur l'erreur de votre administration, c'est vous qui deviez faire le nécessaire pour régulariser toussa, parce que Dame Belle-Doche, elle, elle voudrait bien un peu de thunes, hein, un peu quoi. Vous vous souvenez ? Même que vous deviez envoyer un "lotus" pour nous envoyer un courrier qu'on n'a jamais reçu et qu'aujourd'hui, tu me dis que tu veux que JE te l'envoie ce putain de courrier.
Monsieur D., je sais pas si tu as déjà visité un autre pays que la France, mais le formulaire d'existence, ils vont bien se marrer, les Belges de la commune, quand je vais le leur demander. Nan, chez nous, y'a pas. Tu peux le comprendre ça ? Ton service "Résidents étrangers", il a pas des formulaires à faire compléter par des administrations étrangères ? Et tu voudrais que je m'envoie le document à moi ?
Puis c'est quoi c't'histoire de te renvoyer un 13e courrier pour effectuer un changement d'adresse ? Toi, tu as la bonne adresse, toi, tu voudrais pas informer tes collègues via ce que tu veux ? Puis, faudra que tu m'expliques qu'avec le numéro de sécurité sociale de Dame Belle-Doche, tu retrouves TOUT son dossier, sauf son adresse ?
Ouais, et puis j't'l'dis là, ça me gonfle que tu veuilles pas travailler par e-mail. Tu sais c'que ça me coûte de te téléphoner 40 minutes sur mon portable ? pendant que tu connectes sur ton programme Machin, pendant que ta requête Bidule tourne, moi, je raque. Tout ça parce qu'en fait, t'en fous pas une, et que j'ai juste pas d'bol d'être tombé sur toi, hein, mon champion ?
Dis-moi, Monsieur D., tu serais pas en train de me prendre pour une tarte ?