
Le bébé dormait paisiblement sur la poitrine de sa maman, et aucun des gestes que celle-ci faisait pour l'accueillir au mieux ne l'avait fait bouger d'un pouce. Cendrillon lui caressa la joue du bout du doigt et déposa une toute petite caresse sur sa toute petite main. Il lui semblait loin ce temps du nouveau-né, tout frippé, tout petit et tout recroquevillé.
Elle embrassa longuement son amie, et la félicita encore une fois, bien qu'elle l'avait déjà fait maintes fois au téléphone. Elle lui offrit les quelques broutilles qu'elle avait préparées pour elle, plus que pour le bébé qui aurait son cadeau plus tard, mais elle se sentit vite passer à côté de l'essentiel.
Voir Pocahontas en proie à des émotions si vives la mit mal à l'aise. D'ordinaire, Pocahontas n'aurait pas gardé sa peine, et la chute, ou le tsunami d'hormones qui se mêlaient à la fatigue auraient bien eu raison de sa joie de vivre habituelle. Mais là, Cendrillon sentit que le vent avait pris une toute autre tournure.
Le tout petit qui n'avait toujours pas bougé et dont elle caressait de ses lèvres les doux cheveux venait de subir différents examens et une zone d'ombre avait fait naître de nombreux questionnements quant à ses capacités motrices et intellectuelles.
Le tsunami venait de prendre une toute autre intensité et Cendrillon ne cherchait même plus ses mots, elle avait opté pour le silence et accueillait chacune des terribles angoisses de cette toute nouvelle maman, de cette amie si chère à son coeur.
Pocahontas avait besoin de bouger et demanda si Cendrillon voulait bien le prendre quelques instants. Cendrillon le regarda de tout près, le sentit, le ressentit et rien n'aurait pu différencier ce bébé d'un autre. Il y avait juste des mots en trop, qui venaient noircir une toile ensoleillée. Des mots, des doutes, des examens planifiés, lourds et pénibles, des spécialistes à interroger, des milliers de questions et rien d'autre, sinon le vide, l'absence, la solitude face au diagnostic tant redouté, face à l'attente de celui-ci aussi.
Pocahontas ne souhaitait pas alarmer les grands-parents de son bébé, eux qui venaient tous les jours s'extasier devant leur descendance et qui ne se relèveraient sans doute jamais du coup de massue qu'ils allaient sans doute devoir prendre d'ici quelques jours, ou quelques semaines.
Elle avait relégué au dernier plan le baby blues, les problèmes d'allaitement, les nuits hachées et les fils de son épisiotomie, Pocahontas tentait d'imaginer de toutes ses forces l'avenir de celui à qui elle avait donné la vie, elle se battait contre le mauvais sort, la culpabilité, l'injustice, elle se battait pour tenir pour 2, pour 3, pour 10, tenir droite, elle qui se sentait au bord du gouffre, prête à tomber de très haut.
Cendrillon ne voulait pas pleurer, parce que son amie avait besoin d'une main solide, compatissante certes, mais solide, présente, et prête à porter ce petit mec qui ressemblait à tous les autres petits mecs de la terre, avec ce petit truc en plus que seul l'amour peut définir parfaitement : l'attachement, le lien qu'elle voyait naître de l'intensité, et paradoxalement de l'absurdité de cette rencontre tant désirée entre une maman et son fils.
3 commentaires:
...le plus dur est l'impuissance de l'attente...?
Ma sincère sympathie, faute de mieux, à Pocahontas... elle a de la chance d'avoir une amie comme Cendrillon, hein...
Aussi difficile que se soit d'avoir à "soutenir" une amie dans cette situation horrible, je suis ""soulagée"" de lire que Pocahontas as su se liberer un peu avec toi. je vais penser fort a ce petit bout d'homme ainsi qu'a ses parents.
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