dimanche 24 mai 2009

Cherche papy d'urgence

Il y a des familles décimées, où l'on devient parent sans avoir les siens pour nous féliciter, où on s'engage à élever nos enfants sans leurs grands-parents, mais avec leur souvenir et leurs photos.

On évoque très vite la mort, la maladie, l'accident, on essaie d'expliquer pourquoi celui et celle qui nous ont donné la vie ne l'ont plus et pourquoi il est important d'en parler. On se retrouve maman, à penser fort à la sienne, lorsqu'on ne sait plus quoi faire avec notre enfant dans les bras et qu'on voudrait juste être rassurée et savoir qu'au même âge, on a fait pareil. On se retrouve papa, à penser fort au sien lorsqu'une petite discussion entre hommes se fait ressentir, un peu, beaucoup, et parfois passionnément.

J'ai l'immense chance d'avoir encore mes parents. Et le Prince aussi. En théorie, les miss ont donc 2 grands-mères et 2 grands-pères. Sauf que les grands-pères, toujours vivants, ne sont pas présents. L'un des deux, trop nocif, a été écarté d'office, comme une mesure de précaution que nous nous devons de prendre pour nos enfants. L'autre a choisi de rayer de sa vie ses enfants et ses petits enfants, jonglant avec sa conscience deux fois l'an en moyenne, fier de se rappeler qu'un e-mail de 4 mots ressemble au laconique télégramme d'autrefois.

- Il est mort mon grand-père, maman ? 
- Non, ma chérie, il habite loin.
- On peut aller le voir ? 
- Non, il ne le souhaite pas.

Quel enfant peut entendre qu'il n'est pas le bienvenu dans sa propre famille ? Lui qui n'a rien fait.

- Et pourquoi il veut pas nous voir ? 
- Je ne sais pas.

C'est la seule réponse sensée que j'ai trouvée. Une phrase abrégée pour dire "je ne sais pas en parler". Parce que du haut de tes 4 ans, ma chérie, je ne vois pas comment tu pourrais entendre qu'un papa doit se cacher pour appeler ses enfants, et qu'une femme malveillante est à l'origine de situations rocambolesques, et qu'un homme accepte cela, sans broncher, comme vérité absolue, comme seul avenir.

On peut renier ses valeurs et ne pas en souffrir. Ou bien se laisser bercer par le soleil et le quotidien et de se tartiner de promesses d'y penser le lendemain. A moins de se laisser porter par la douce illusion que le temps apporte des réponses aux questions qu'on n'ose même pas se poser.

Je continue de penser depuis longtemps qu'il me serait plus facile de parler de mon père mort. J'aurais partagé avec mes filles le souvenir d'un homme que j'ai longtemps admiré, et j'aurais transmis son souvenir avec émotion, avec respect et amour. Aujourd'hui, je dois trouver les mots pour parler de l'absence, de la distance, du désintérêt.

Si MM2 ne semble pas (encore) souffrir de l'absence du grand-père, mon coeur de maman saigne lorsque je constate que MM1 voue une tendresse infinie aux hommes grisonnants qui frôlent la soixantaine. Elle les accapare totalement, et les câline, même si c'est la première fois qu'elle les rencontre. Elle ne parle que d'eux les jours qui suivent. Tant et si bien que j'en viens à chercher un papy de substitution. 

Mais qui peut remplacer un grand-père ? Faire ce lien entre les générations, raconter des histoires sur le passé et surtout, aimer un enfant comme si c'était le sien ...

7 commentaires:

Carole a dit…

Chez nous, un seul grand-père, deux mamies mortes et un grand-père aux abonnés absents depuis 38 ans... les questions ne viennent pas encore sauf sur les mamies... mais un jour elle se rendra bien compte que son papa a eu un papa... on verra...
ça nous manque aussi de ne pas avoir de mamies mais comme tu dis malgré celles de substitution, rien de remplace les "vraies"...
pas facile de dire à un enfant toutes ces vérités sur les adultes de leur famille qui ne veulent pas les voir...

Anonyme a dit…

quand je vois l'admiration de Gabin et Alice pour leur papy, je comprends le manque de MM1.

quelle sera leur réaction le jour où ils sauront que c'est un "papy de substitution " comme tu dis et que celui du sang a refusé de les connaitre?

un avis de quelqu'un étant passé par là me rassurerait.
Papsy

Dominique a dit…

Au sujet du grand-père absent, la réponse que nous donnions était invariablement "parce qu'il n'est pas intéressant", et ça leur suffisait. Mais la grande différence avec ta situation est que l'autre grand-père était l'objet de toutes leur admiration - bien méritée d'ailleurs !
Aujourd'hui qu'ils sont presque adultes, nous leur avons expliqué le pourquoi du comment et ils ne semblent pas avoir pâti de son absence.

2L a dit…

aïe.
honte et lacheté sur papy.
...
et toi, n'aurais tu pas des choses à lui claironner à ce vieux papa là ?

Lola a dit…

On a des envies de familles idéales, ambiance Petite Maison dans la Prairie, et puis il faut faire avec la réalité et les cartes que la vie nous a données. Je crois que les enfants s'adaptent à beaucoup de choses, mais qu'ils ressentent très vivement nos propres émotions, y compris celles qu'on n'exprime pas... Est-ce qu'il ne serait pas possible que le manque de MM1 puisse être en partie le miroir de tes regrets ?
A côté de ça, pour les familles où les grands-parents sont présents, il y a d'autres pièges pour le coeur des enfants, comme le grand-père qui s'énerve un peu vite parce qu'il ne connait que ce mode-là et qui ne voit pas les traces que ça laisse à l'intérieur... ou les grands-parents trop protecteurs qui viennent s'immiscer entre les enfants et les parents... bref, que des histoires "normales", mais ô combien pesantes à "déminer" en permanence...

Mémère Cendrillon a dit…

Carole, je suis désolée de lire que chez vous aussi, un abonné absent cohabite avec des défuntes... J'espère que Nina trouvera les réponses aux questions qu'elle risque de se poser bientôt.

Papsy, le lien du sang est secondaire finalement, l'important, c'est d'être là, auprès des enfants et de les aimer pour de vrai. Là, on devient un vrai papy, ou une vraie mamie. On ne peut tricher avec eux. j'espère sincèrement te rassurer, Papsy, parce que je n'ai aucun doute sur le fait qu'Alice et Gabin n'auront pas connu le manque. le reste, c'est qu'une histoire d'étiquette.

Dominique, un des deux grands-pères a réussi à prendre la place pour deux; Finalement, c'est une belle réussite !

2L, encore faut-il qu'il veuille bien les entendre... :-(

Lola, ton commentaire résonne très profondément en moi. Bien sûr qu'elle a certainement capté ma tristesse, ma déception, et mon émotion à fleur de peau dès que nous en parlons. Et c'est sûr que des rêves de famille idéale, nous en avons en nous, ancrés profondément. Mais là, je demande pas la famille idéale, c'est juste que je comprends pas comment on peut tout rayer, sans aucun regret, et fuir, fuir, et fuir encore le regard de ses petits-enfants...

Merci 1000 fois pour vos mots si doux.

Anonyme a dit…

merci pour intiresny Dieu