Dans l’histoire de Cendrillon, celle-ci pleurniche et se mouche devant l’injuste décision de sa méchante belle-mère de la laisser nettoyer la baraque pendant que ses demi-sœurs moches et idiotes vont tenter de faire « belle-belle » au bal, histoire d’attirer sur elles le regard du beau et riche Prince vraiment charmant.
Au lieu d’aller chercher son père qui est censé être le Roi (non mais !) afin que celui-ci règle, une bonne fois pour toutes, le sort à la vilaine belle-mère, c’est sa marraine, la fée, qui apparaît, et qui d’un coup de baguette magique, transforme une citrouille en carrosse, et Cendrillon en princesse, lui permettant ainsi de se rendre au bal et de se faire remarquer du Prince.
La suite, vous la connaissez, je vous l’épargnerai donc.
Moi, vieille Cendrillon qui s’en fout d’aller au bal séduire un Prince, parce que j’en ai déjà un (et que je ne sais absolument pas ce que je ferai d’un deuxième), je peste aujourd’hui de ne pas avoir de marraine.
Je me serais mise à pleurer, là, et elle serait apparue, peu importe son look, son âge, son poids, je l’aurais aimée. Elle m’aurait demandée le pourquoi de mes larmes, et je lui aurais expliqué toute ma frustration, tout mon dépit, cette remise en question permanente et obsédante, dont je vous livre une infime partie ici :
- je comprends rien, Cendrillon
- qu’est-ce que tu ne comprends pas ? Tu peux expliquer, avec d’autres mots ?
- ben, euh, non, ché pas, je suis perdue
- bon, regarde-moi, et écoute moi, cesse de te dire que c’est compliqué. Imagine-toi, tu te promènes en ville, tu as faim, très faim. Tu as devant toi une mercerie et juste à côté une boulangerie. Tu vas entrer où ?
- ben, euh, ché pas…
- comment ça tu sais pas ?
(une autre fille)
- c’est quoi une mercerie, Cendrillon ?
C’était donc ça. La première ne savait certainement pas ce que c’est, une mercerie. J’explique donc ce qu’on peut y trouver, insistant quand même sur le fait que si je meurs de faim et que j’ai une boulangerie devant moi, il y a de fortes chances pour que j’y trouve de quoi calmer ma faim, au grand dam de ma balance, of course.
Remise en question de mon exemple, donc. Je reformule, et au lieu d’utiliser le méchant mot « mercerie », j’opte pour l’enseigne du magasin qui se trouve dans la rue, à quelques mètres d’ici, enseigne archi connue, mille fois plus que le mot « mercerie ».
Mais rien. Affamée, ma stagiaire serait restée là, plantée sur le trottoir, attendant la becquée, au lieu de regarder autour d’elle.
Marraine, pitié, magne-toi les fesses, prends 50 baguettes magiques s’il le faut, mais donne-moi quelques sacs de neurones à distribuer, afin qu’ils ferment leurs bouches grandes ouvertes et que leurs regards prennent vie, afin qu’ils aient enfin les moyens de penser, tout seuls comme des grands, comme des adultes responsables, des citoyens éclairés…
La fin de mon histoire est sordide, je vous le dis : je vais me chercher un séminaire sur la créativité. Bientôt, j’expliquerai 1+1=2 en dessinant des poules, et on s’enverra des courriers en langage SMS, et à la place de l’adresse du destinataire, on collera un autocollant de bisounours.
Bon, c’est pas tout, après mes envies de meurtres, j’ai envie d’un bon café.
6 commentaires:
C'est grave, ça fait peur pour l'avenir tout de même! mais heureusement nos enfants vont relever le niveau!!
En ce moment, c'est Cendrillon en boucle à la maison, j'apprends les chansons et tout et tout... mais enfin, le roi n'est pas le père de Cendrillon!!! Bises
J'espère que ta stagiaire n'est pas un exemple type de la génération qui nous suit! Alors faudra-t-il attendre la génération suivante (celle que nous élevons)pour nous sortir de là? Cendrillon a intérêt à se trouver un plan B en attendant...
euh! tu fais quoi comme boulot exactement? parce que ce que tu décris là ça fait peur quand même... et pourtant je bosse avec des gamins en grande difficulté et qui ne parle pas toujours le français!
Carole, attends, tu es en train de me dire que j'ai tout faux ? Je pensais avoir compris que la mère de Cendrillon était décédée peu parès sa naissance et que son père s'était remarié à sa belle-mère et avait eu 2 autres filles. Nan ? C'est pas ça ? Pire que Dallas... j'te l'dis !
CarrieB, Cendrillon a des plans B pleins la tête, fort heureusement !!
Dino, heureusement, il y en a aussi des biens, mais en ce moment, c'est plutôt morose...
Au lieu d’aller chercher son père qui est censé être le Roi (non mais !) afin que celui-ci règle, une bonne fois pour toutes, le sort à la vilaine belle-mère,
Mais non t'as pas tout faux, c'est juste cette phrase que je n'ai pas comprise!!!
Une Marraine ... Je peux dire aujourd'hui que si mon parrain ne me manque en rien, le fait de lire ton article du jour m'a fait sortir deux grosses larmes aux bords des yeux !
C'est tellement difficile de se rendre compte que plus on avance, plus on se sent seule au monde.
On reconstitue un foyer à soi, un clan bien solide mais les fondations essentielles à notre vie s'effondrent peu à peu quand ceux qu'on chérie partent les uns après les autres.
Ton message du jour me permet donc d'avoir une pensée particulière pour ma marraine qui me manque terriblement.
Merci pour ça !
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