Journée vraiment mitigée.
D'une part, une visite de la Grand Place de Bruxelles, avec son et lumière et du monde à foison, bataille de poussettes et policiers omniprésents pour cause de menace terroriste sur la capitale. Nous avions laissé la voiture dans le quartier "des affaires" et avons pris le métro, pour le plus grand bonheur de MM1, et avons pu constater, une fois de plus la difficulté de se mouvoir avec des poussettes dans le sous-sol citadin.
Il n'aura fallu que quelques secondes pour qu'une petite frappe casse le carreau arrière, celui du coffre, et s'empare du sac des filles, celui-là même que j'avais laissé dans le coffre afin de ne pas tenter des mains entrainées dans la foule. Un sac qui contenait quelques couches, et les doudous des filles. Aucune valeur pécuniaire, mais tant d'amour et de réconfort.
Certes, je râle un peu. Pour la forme. Mais je ne cesse de me dire que c'est "le moins pire" des dégradations que nous aurions pu subir. Par contre, j'ai le coeur tout retourné d'avoir vu ma grande fille impressionnée par les milliers de morceaux de verre, par le sac volé, par son doudou disparu, elle qui le réclamait depuis des dizaines de minutes. Je suis triste de l'avoir entendue me supplier de n'aller à la police que demain, parce qu'elle avait peur que je me fasse tuer (où est-elle allée chercher ça ?), alors que le Prince et moi avons joué la désinvolture au maximum. Bref, je me fous des dégâts, mais la colère et la peur dans les yeux de MM1 ont eu raison de ma bonne humeur toute latente.
En chemin, nous avons croisé un chocolatier, un liégeois, je pense. Mini-boutique très bon chic bon genre qui affichait des petites mignardises rondes et colorées : des macarons ! Depuis le temps que j'en entends parler, pas question de passer devant l'étalage sans y goûter.
J'ai acheté 9 macarons. J'ai attendu que les enfants soient couchés pour les déguster en compagnie du Prince. Nous avons partagé chacun des 9 macarons, afin de tous les goûter. Mon dieu, qu'ai-je fait ? Je n'aurais jamais dû m'arrêter, ni les regarder, encore moins les acheter ... A quelle tentation vais-je devoir résister ?
Parce que là, je vais l'avouer, je viens de faire une expérience profonde et délicieuse, puissante et enivrante, aérienne et ... calorique.
Hum. Les bonnes résolutions, c'est pour l'année prochaine, non ?
dimanche 30 décembre 2007
vendredi 28 décembre 2007
Le dîner
C'est au moment même où j'ai prononcé la question fatidique que tout a commencé : "Que vais-je faire à Noël ?" en pensant au repas du réveillon. Cette question, j'aurais pu me la poser, moi toute seule au supermarché, ou moi au Prince dans la cuisine, mais je n'aurais pas dû, la poser à haute voix devant cette même famille qui allait être à ma table une dizaine de jours plus tard.
A Noël, point de tradition. Point de dinde obligée, de marrons, d'airelles et autres joyeusetés du moment. Juste l'envie de partager un repas ensemble.
"Partager un repas ensemble" peut prendre diverses connotations. Pour les uns, du saucisson et un bon pain feraient l'affaire, pour d'autres, le menu de fête s'impose, d'autres encore se contenteraient de l'ambiance de Noël avec un repas "de tous les jours".
Joli débat. Sauf que ma question avait pour seul et unique but de rappeler à ma mémoire faillible les goûts des uns, les dégoûts des autres, histoire de ne pas acheter dix douzaines d'huîtres si seules trois personnes en mangent. Je pensais prendre la température discrètement, histoire de ravir toutes les parties.
J'ai finalement gardé mon calme, pour plusieurs raisons : nous étions moins de dix adultes à table, on aurait pu être 24; je n'ai pas 2 beaux-frères carnivores, une belle-soeur chez Weight-Watcher, une autre végétarienne, une belle-mère inscrite aux Alcooliques Anonymes, ni un frère allergique au poisson, un autre au fromage, une mère qui ne mange pas de porc, une soeur anorexique, un père à l'appétit gargantuesque.
J'ai donc composé un menu festif, de mon choix. Mais je n'ai pas réussi à concilier mes propres désiderata avec les goûts de tous mes invités, ce qui m'a valu un 2e menu, un choix.
Et c'est là que je me suis demandée comment cela se passait chez les autres ? Tenez-vous compte des goûts de vos invités ou non ?
Soit. La discussion autour du menu de Noël m'a fait penser à Muriel Robin. Connaissez-vous son sketch "l'addition" ? Le revoir m'a fait pleurer de rire...
mercredi 26 décembre 2007
Docteur House, à l'aide !
Je suis une handicapée de la télé.
Alors que je peux tout lire, du suspens intenable au roman ensanglanté, et ce, même seule dans une grande maison isolée, je suis incapable de regarder un feuilleton, un film, une histoire à la télé ou au cinéma, qui fasse peur, qui soit stressant, ne serait-ce qu'un tout petit peu.
Le pire dans tout ça, c'est que j'adore ces histoires tirées par les cheveux, ces suspenses à rebondissements, ces serial-killers à la psychologie noire. Mais impossible de regarder un film, un épisode de feuilleton sans avoir envie de rendre mon repas.
J'ai tenté d'écouter sans regarder, je suis oppressée par l'angoisse et pose dix mille questions au Prince qui en a ras-le-bol de mes crisettes. Regarder sans le son, c'est tout bonnement impossible, tant la curiosité me pousse à savoir ce qu'il se passe exactement.
Du coup, je m'active. Plus le film me stresse, plus je bouge, je fais tourner une machine, je repasse, je vide le lave-vaisselle, et demande au Prince de m'expliquer ce que j'ai manqué. C'est la seule manière pour moi de me tenir un tant soit peu au courant de l'actualité télé. Le cinéma, hum, comment dire ... outre le fait que la dernière fois que je m'y suis rendue remonte à des lustres, j'ai passé des films entiers avec les mains devant les yeux et les pouces qui bouchaient mes oreilles, le tout derrière mes genoux, la peur au ventre... Je me souviens être sortie de la salle, après avoir broyé le bras de mon voisin, pour rendre mon repas.
Ca remonte loin, ce truc, hein, je me souviens que lors de mes premières "soirées pijama", on avait loué "L'exorciste". J'ai finalement réussi à le voir en entier, en 14 fois, tellement je sentais mon coeur lâcher à chaque fois.
Bref, j'ai 33 ans, et j'aimerais bien être capable de regarder Prison Break sans être malade.
mardi 25 décembre 2007
Noël, le sapin et un souvenir
Enfant, Noël était une fête pour les autres. Parce que chez nous, on ne le fêtait pas vraiment. Certaines années, il y avait un repas de fête, d'autres, des cadeaux, rarement un minuscule sapin, rarement des décorations.
Il manquait l'esprit de Noël, tant et si bien que souvent, je me couchais en pleurant, me demandant pourquoi tant d'enfants attendaient Noël avec tant d'impatience. Je me couchais, le nez reniflant et les joues mouillées de larmes, m'endormant en rêvant que le miracle se produise pendant la nuit.
Le miracle de Noël, il est apparu il y a 3 ans.
MM1 devait pointer le bout de son nez vers le 29 décembre. Mais une césarienne fut finalement programmée le 15, 2 semaines plus tôt. La veille de mon entrée à l'hôpital, le Prince et moi sommes allés choisir un arbre que nous avons aussitôt planté dans notre jardin, symbole de vie, de la nature qui nous avait cruellement lâchée dans notre vie de parents "en attente de l'être".
Plusieurs fois, je m'étais demandée si nous allions mettre un sapin, sachant que nous allions passer Noël juste à 3, pour cause de grosse envie d'apprendre à se connaître et à trouver nos marques, juste entre nous. J'avais très envie de décorer la maison, mais l'énergie me manquait cruellement. Le Prince ne trouvait pas l'idée judicieuse et le sujet fut clos, d'autres aventures nous attendaient.
La naissance de MM1 fut loin d'être une partie de plaisir et les premiers jours qui ont suivi ont vite tourné au cauchemar, entre un allaitement qui démarrait très mal, une pitchoune qui perdait du poids sans en reprendre, entre dix contradictions entendues sur un après-midi, 18 visites à gérer et une côte froissée qui rendait ma respiration très douloureuse.
Je désirais ardemment rentrer à la maison, et en même temps, je redoutais le face-à-face terrifiant avec mes premières angoisses de mère face à un nourrisson pour lequel j'aurais donné ma vie... Le 22 décembre, ce fut chose faite, je rentrais. Il faisait très froid, ce jour-là, et dans la voiture, je me souviens de mon vertige face à tant de clarté, à la peur d'avoir un accident de voiture, à l'angoisse de ne savoir que faire si mon bébé se mettait à pleurer. Cette nouvelle vie me flanquait une trouille bleue, et je ne savais si j'allais être à la hauteur. La chute hormonale en a rajouté une large couche et Mémère s'est transformée en une vraie usine à larmes, pour un oui, pour un non.
Nous sommes arrivés à la maison et le Prince s'est dépêché d'aller ouvrir la porte et de déposer les premiers bagages. Il est revenu m'aider à sortir notre fille de la voiture et à trois, nous sommes entrés dans notre maison, que le Prince avait décorée d'un sapin et d'une guirlande lumineuse.
Les mots me manquaient tant la surprise était immense, tant la chaleur dégagée par ce tableau réchauffait mon coeur torturé par l'angoisse, appaisait mon esprit embué.
Nous n'avions rien prévu pour Noël cette année-là. Notre cadeau, nous le tenions dans nos bras, nous étions bien, enfin parents.
Depuis ce Noël, j'ai séché mes larmes, les hormones se sont calmées.
Depuis ce Noël, j'aime Noël.
Hier soir, les cadeaux étaient au pied du sapin, MM1 et MM2 les prenaient en main, MM2 voulait les ouvrir, MM1 le lui interdisait mais ne se privait pas de commenter les paquets "ça, je crois que c'est un DVD, mais on peut pas l'ouvrir, hein !"
Les voir si complices, à genoux devant le sapin, ce fut mon plus beau cadeau.
Je vous souhaite un très bon Noël, chers lecteurs...
samedi 22 décembre 2007
Ingrid
Quand elle les a quitté, ils n'étaient que des enfants, ils jouaient aux Playmobils, aux Barbies, et se chamaillaient comme tous les frères et soeurs du monde. Et même si ces enfants savaient que leur mère était une personnalité politique qui avait choisi de se battre contre la corruption de son pays, ils ne devaient pas, du haut de leur âge, bien comprendre de quoi il en retournait, ni imaginer, qu'un jour, ils devraient se battre, à leur tour, pour sa libération, sa vie, son souffle.
Ingrid,
Six lettres pour le combat
Combat pour la liberté
Liberté rendue à ton peuple
Peuple derrière toi aujourd'hui
Ingrid,
Six lettres pour la survie
Survie physique dans une jungle de brutes,
Survie mentale dans l'isolement complet
Ingrid,
La flamme qui a fait de toi cette femme qui a osé les regarder dans les yeux
La flamme qui a fait de ta vie une lutte de chaque instant pour un monde plus juste
La flamme qui a fait de toi une mère par 3 fois
Ingrid,
Cette flamme
Garde-la en veille
Encore un peu
Le temps qu'enfin
Tu sois devenue une priorité politique
Ingrid,
Ce 6e Noël que tu passeras à te consummer lentement
Ce sera le dernier
Il faut le croire, le dire, l'espérer
Pour que prenne fin ta vie d'otage
Pour que prenne fin cette petite mort
Il le faut.
jeudi 20 décembre 2007
Trampoline
Lorsque mon chef se pointe dans mon bureau, avec un grand sourire et une voix enjouée, et me pose, l'air de rien, mine de tout, une question d'une apparente banalité, je n'ai pas beaucoup de difficulté à deviner qu'il se trame un nouveau projet ou qu'une complication va venir perturber les plans initialement prévus.
Lorsque le Prince me donne qu'une demie information au sujet d'un événement prochain, je n'ai pas besoin de le questionner davantage, je crois toujours connaître ses intentions.
Lorsque mon corps me lâche au moment M où j'ai absolument besoin de lui, je sais exactement quel neurone a disjoncté et se venge sur quel organe. Même si je refuse de l'avouer, je mène ma barque plus souvent sur la houle que sur le ruisseau, mais je la tiens des 2 mains, histoire de ne pas la lâcher, histoire de rester le maître à bord.
Je n'ai pas lâché ma barque depuis des années. Et même si souvent les forces m'ont abandonnée, même si la tempête me faisait reculer au lieu d'avancer, dans l'obscurité la plus totale, il y a une seule chose qui m'a fait tenir bon, à agripper cette barque des 2 mains : l'anticipation.
C'est bien cette faculté d'anticiper qui m'a toujours fait entrevoir une suite meilleure, des temps sereins, des flots plus calmes, des lendemains radieux.
Mais l'anticipation a ce côté négatif qu'elle me colle la vision de la chute avant qu'elle n'ait eu lieu.
Depuis quelques semaines, MM1 et MM2 partagent un moment de complicité intense en sautant sur notre lit, comme 2 puces folles. Le petit jeu consiste à sauter quelques fois et puis se laisser tomber sur le lit. Ca les fait hurler de rire.
Jusque là, l'histoire est mignonne, mais ce que mon oeil parvient à voir en temps réel, c'est la chute de l'une d'elle, la tête contre l'arrête de la garde-robe, c'est MM1 qui s'écrase violemment sur MM2, c'est leurs 2 têtes qui se choquent... Ces visions me gâchent évidemment le plaisir de les voir tant s'éclater.
Cela fait des jours que je cherche une solution pour savourer ce moment magique avec elle, afin qu'elles puissent en profiter en toute sécurité et que je puisse ne pas venir les parasiter avec mes angoisses trop rationnelles pour 2 petites filles de leur âge.
C'est chose faite ce soir.
Mon dieu, c'était bon, quel fou rire, quel sentiment de liberté...
mercredi 19 décembre 2007
Histoire belge
La fête nationale belge a lieu, chaque année, le 21 juillet. Sauf cette année. Aujourd'hui, c'est aussi un jour de fête nationale : nos dirigeants ont réussi à se mettre d'accord sur un gouvernement, après 192 jours de crise politique sans précédent.
A les écouter vanter leur exploit sur les ondes, il s'agit vraiment d'un cadeau de Noël pour la Belgique. Dans l'enveloppe gouvernementale, sous le sapin, ils nous promettent de plancher sur le pouvoir d'achat en berne, sur la facture du chauffage, sur le chômage, sur la hausse des salaires...
Ils nous feront croire qu'en 3 mois, ils vont rattraper leurs 6 derniers mois d'inactivité et résoudre tous les conflits d'un coup de baguette magique.
Alors, oui, il était temps d'avoir un gouvernement, un vrai, un seul, fort et uni. Mais les Belges sont tout sauf cons : il y a bien longtemps qu'ils ne croient plus au Père Noël !
mardi 18 décembre 2007
Merci facteur !
Je ne devais pas avoir plus de 6-8 ans, j'adorais quitter la maison et me retrouver 1 ou 2 semaines loin du foyer familial en colonie de vacances. Non pas que je sois malheureuse auprès de mes parents, mais parce que j'aimais la vie en communauté, les multiples activités organisées, et que le reste ne me manquait absolument pas.
Il me reste un souvenir très marqué de cette époque, celui de l'écriture des cartes postales. Alors que les uns bâclaient la tâche en se contentant d'un "gros bisou de la mer", d'autres s'enorgueillissaient d'un "je vais bien, je mange bien, à bientôt", je pouvais passer des heures à écrire tout ce que je faisais, à partager toutes les expériences vécues, tant et si bien qu'il me fallait toujours 3 fois plus de cartes postales que les autres.
En contrepartie, mes parents jouaient toujours le jeu et m'écrivaient une lettre par semaine, une longue lettre avec pleins de nouvelles anodines mais néanmoins précieuses, vu la distance qui s'était installée pour quelques temps. La lecture de ces nouvelles me transportait de joie, à chaque fois, ces instants de solitude passés à déchiffrer l'écriture de mon père m'enivraient, l'émotion me gagnait, même si je mettais un point d'honneur à ce qu'elle n'apparaisse pas.
Adolescente, mes amies et moi, on s'écrivait presque tous les jours, pour se dire des choses qu'on savait déjà, pour sceller l'amitié, pour partager, pour sublimer une complicité déjà au faîte.
Mes premières amours aussi ont vu des lettres interminables et brûlantes avalées dans des enveloppes blanches et froides partir le soir pour arriver le surlendemain matin, et ont connu l'attente de la réponse, la venue du facteur, et ce même sentiment de bonheur, les mains tremblantes de désir à la vue de l'enveloppe tant espérée.
Hier soir, nous avons trouvé une enveloppe au nom de MM1, que le facteur avait déposé dans la boîte aux lettres. Je la lui ai remise et elle s'est empressée de l'ouvrir, le sourire aux lèvres. Elle s'est littéralement jetée sur le "pins" qui accompagnait la carte d'anniversaire, puis a réalisé qu'il y avait des mots écrits à l'intérieur. Elle me l'a tendue et m'a demandé ce qu'il était écrit. Je lui ai donc lu la carte et elle a écouté religieusement, puis elle a voulu répété les mots et montrait chaque lettre avec son doigt, me demandant de l'aider à lire "les mots". 15 fois, j'ai dû lui relire la carte, jusqu'à ce qu'elle la connaisse par cœur. Elle était tellement émue, si contente, qu'elle a mis la carte contre son cœur et a dit 10 fois "merci" au petit garçon qui s'était fait aidé de sa maman pour la rédiger.
La voir si heureuse devant sa carte d'anniversaire m'a replongé sur mon lit en colonie de vacances. L'émotion du souvenir mêlée à l'émotion de voir ma fille elle-même si émue a eu raison de mon petit cœur…
Il me reste un souvenir très marqué de cette époque, celui de l'écriture des cartes postales. Alors que les uns bâclaient la tâche en se contentant d'un "gros bisou de la mer", d'autres s'enorgueillissaient d'un "je vais bien, je mange bien, à bientôt", je pouvais passer des heures à écrire tout ce que je faisais, à partager toutes les expériences vécues, tant et si bien qu'il me fallait toujours 3 fois plus de cartes postales que les autres.
En contrepartie, mes parents jouaient toujours le jeu et m'écrivaient une lettre par semaine, une longue lettre avec pleins de nouvelles anodines mais néanmoins précieuses, vu la distance qui s'était installée pour quelques temps. La lecture de ces nouvelles me transportait de joie, à chaque fois, ces instants de solitude passés à déchiffrer l'écriture de mon père m'enivraient, l'émotion me gagnait, même si je mettais un point d'honneur à ce qu'elle n'apparaisse pas.
Adolescente, mes amies et moi, on s'écrivait presque tous les jours, pour se dire des choses qu'on savait déjà, pour sceller l'amitié, pour partager, pour sublimer une complicité déjà au faîte.
Mes premières amours aussi ont vu des lettres interminables et brûlantes avalées dans des enveloppes blanches et froides partir le soir pour arriver le surlendemain matin, et ont connu l'attente de la réponse, la venue du facteur, et ce même sentiment de bonheur, les mains tremblantes de désir à la vue de l'enveloppe tant espérée.
Hier soir, nous avons trouvé une enveloppe au nom de MM1, que le facteur avait déposé dans la boîte aux lettres. Je la lui ai remise et elle s'est empressée de l'ouvrir, le sourire aux lèvres. Elle s'est littéralement jetée sur le "pins" qui accompagnait la carte d'anniversaire, puis a réalisé qu'il y avait des mots écrits à l'intérieur. Elle me l'a tendue et m'a demandé ce qu'il était écrit. Je lui ai donc lu la carte et elle a écouté religieusement, puis elle a voulu répété les mots et montrait chaque lettre avec son doigt, me demandant de l'aider à lire "les mots". 15 fois, j'ai dû lui relire la carte, jusqu'à ce qu'elle la connaisse par cœur. Elle était tellement émue, si contente, qu'elle a mis la carte contre son cœur et a dit 10 fois "merci" au petit garçon qui s'était fait aidé de sa maman pour la rédiger.
La voir si heureuse devant sa carte d'anniversaire m'a replongé sur mon lit en colonie de vacances. L'émotion du souvenir mêlée à l'émotion de voir ma fille elle-même si émue a eu raison de mon petit cœur…
lundi 17 décembre 2007
Bleu ou rouge ?
J’aime arpenter les rayons du supermarché quand :
- il n’y a presque personne
- je suis seule ou avec une de mes filles uniquement
- j’ai le temps, c’est-à-dire plus que « 30 minutes-top-chrono-sinon-je-vais-encore-être-en-retard-chez-Machin ».
- je n’ai pas de contraintes budgétaires spécifiques
- je n’ai pas de liste bien précise et peu donc flâner et « compulser » au gré de mes envies, et surtout, de mon humeur…
Autant le dire, c’est rare, voire même rarissime que cette configuration-là se dessine.
Mais il arrive, de temps en temps, que je dispose d’un peu de temps, d’un peu d’argent, que les filles sont étonnement sages, et que la supérette est quasi vide. Les courses deviennent alors le moment idéal pour m’adonner à mon passe-temps favori : l’hésitation.
Célibataire, sans enfant, avec un revenu, je pouvais passer 2, voire 3 heures dans un hypermarché, à prendre un article, lire sa composition, à décortiquer l’emballage, à le soupeser, à le déposer dans le charriot pour finalement changer d’avis quelques rayons plus loin, revenant sur ma première idée, de loin plus judicieuse, quoique…
Vu la charge de mon planning actuel et la tronche de mon banquier, j’ai définitivement abandonné l’idée de passer 3 heures dans une grande surface. Aujourd’hui, je me contente de 7 rayons avec l’essentiel dedans.
Entre 2 bottes de carottes, l’une bio, l’autre non, je sais laquelle choisir. Entre 10 variétés de carottes bio, l’une cultivée en terre flamande, l’autre wallonne, une troisième venant de Vendée, ou du Liban, franchement, je doute, et voudrais toutes les goûter avant de me décider.
L’hésitation naît aussi lorsque le Prince me rappelle qu’il manque du papier WC, et que si je trouve une autre marque, plus souple, plus confortable, il est preneur. Me voilà partie devant le rayon à toucher, tâtonner, essayer des yeux le papier X, pour finalement le trouver trop cher, pour l’usage, et les fesses du Prince bien sensibles…
Il faut aussi répondre aux sollicitations de MM1, qui reconnaît les goûters de ses petits copains de l’école et qui aimerait bien avoir les mêmes. « Cui-là, maman, comme Mattéo, et çui-là aussi, comme Louise ». Alors, Mémère prend, regarde l’emballage, suffoque et ventile en lisant la composition et lâche du lest, un peu, désespérée de céder aussi facilement sur un biscuit si savoureux qu’il en est rempli de poisons. Une fois par semaine, ça ne la tuera point, hein !?!
Enfin, arrivée aux caisses, la question du paiement se pose. Quel compte utiliser, ah, mais oui, j’ai encore des chèques-repas, et si je me les gardais pour la semaine prochaine ? Bref, parfois je comprends ma fatigue…
- il n’y a presque personne
- je suis seule ou avec une de mes filles uniquement
- j’ai le temps, c’est-à-dire plus que « 30 minutes-top-chrono-sinon-je-vais-encore-être-en-retard-chez-Machin ».
- je n’ai pas de contraintes budgétaires spécifiques
- je n’ai pas de liste bien précise et peu donc flâner et « compulser » au gré de mes envies, et surtout, de mon humeur…
Autant le dire, c’est rare, voire même rarissime que cette configuration-là se dessine.
Mais il arrive, de temps en temps, que je dispose d’un peu de temps, d’un peu d’argent, que les filles sont étonnement sages, et que la supérette est quasi vide. Les courses deviennent alors le moment idéal pour m’adonner à mon passe-temps favori : l’hésitation.
Célibataire, sans enfant, avec un revenu, je pouvais passer 2, voire 3 heures dans un hypermarché, à prendre un article, lire sa composition, à décortiquer l’emballage, à le soupeser, à le déposer dans le charriot pour finalement changer d’avis quelques rayons plus loin, revenant sur ma première idée, de loin plus judicieuse, quoique…
Vu la charge de mon planning actuel et la tronche de mon banquier, j’ai définitivement abandonné l’idée de passer 3 heures dans une grande surface. Aujourd’hui, je me contente de 7 rayons avec l’essentiel dedans.
Entre 2 bottes de carottes, l’une bio, l’autre non, je sais laquelle choisir. Entre 10 variétés de carottes bio, l’une cultivée en terre flamande, l’autre wallonne, une troisième venant de Vendée, ou du Liban, franchement, je doute, et voudrais toutes les goûter avant de me décider.
L’hésitation naît aussi lorsque le Prince me rappelle qu’il manque du papier WC, et que si je trouve une autre marque, plus souple, plus confortable, il est preneur. Me voilà partie devant le rayon à toucher, tâtonner, essayer des yeux le papier X, pour finalement le trouver trop cher, pour l’usage, et les fesses du Prince bien sensibles…
Il faut aussi répondre aux sollicitations de MM1, qui reconnaît les goûters de ses petits copains de l’école et qui aimerait bien avoir les mêmes. « Cui-là, maman, comme Mattéo, et çui-là aussi, comme Louise ». Alors, Mémère prend, regarde l’emballage, suffoque et ventile en lisant la composition et lâche du lest, un peu, désespérée de céder aussi facilement sur un biscuit si savoureux qu’il en est rempli de poisons. Une fois par semaine, ça ne la tuera point, hein !?!
Enfin, arrivée aux caisses, la question du paiement se pose. Quel compte utiliser, ah, mais oui, j’ai encore des chèques-repas, et si je me les gardais pour la semaine prochaine ? Bref, parfois je comprends ma fatigue…
samedi 15 décembre 2007
Jour de fête !
MM1, tout contre moi...
- Tu sais, ma chérie, il y a tout juste 3 ans, je devenais une maman pour de vrai. Tu es née...
La voix bourrée d'émotion, je m'apprêtais à lui dire combien nous l'avions attendue, combien j'étais la plus heureuse, combien ma vie avait changé. Je voulais qu'elle comprenne chacun de mes mots mais avant que j'aie pu dire quoique ce soit, elle se redressa et me dit :
- Oui, mais tu sais, Maman, je vais encore grandir, grandir, grandir et un jour, je vais prendre tes yeux, tes cheveux, tes lunettes, ton nez, ton coeur, tes mains et j'aurai un petit frère dans mon ventre, et moi aussi, je vais devenir une Maman, une comme toi !
C'est ton anniversaire, ma fille, et c'est toi qui me fais un cadeau inestimable !
Libellés :
Histoires de courgettes,
Maman Courge
vendredi 14 décembre 2007
Mots doux
Tous les soirs, juste avant de me coucher, je dois me faire une injection d'insuline. La solution à injecter est trouble, il faut absolument la mélanger avant de l'injecter.
Je me revois, il y a des années maintenant, face à une infirmière du service de diabétologie d'un grand hôpital bruxellois. Cette femme avait pour mission de recevoir les nouveaux patients et leur apprendre à gérer leur maladie, en pratiquant plusieurs injections quotidiennes et en adaptant leur régime alimentaire.
Je n'ai eu aucun mal à comprendre comment je devais me nourrir, pourquoi certains aliments m'étaient interdits et quelles seraient les conséquences d'un écart. Mais lorsqu'il a fallu passer aux choses sérieuses, comprenez s'injecter de l'insuline, une grosse bouffée d'angoisse m'a fait éclater en sanglots. J'étais confrontée à la seringue, alors que je tombais dans les pommes à chaque prise de sang. Je réalisais enfin que mon quotidien allait être différent, plus contraignant. Je devais lâcher prise.
L'infirmière connaissait son discours par cœur, on le sentait bien, elle récitait son texte, telle une mauvaise institutrice. Je séchais mes larmes en l'écoutant consciencieusement, presque religieusement. Passer à l'acte fut difficile, ma main tremblait, refusait de m'obéir, les larmes qui coulaient sur les cuisses m'empêchaient d'y voir clair.
Les premières injections se sont faites à l'écart, je devais me concentrer, réfléchir, ne pas me tromper, me calmer, respirer, et vaincre cette peur de me piquer. Quelques semaines plus tard, je me piquais dans le bus, dans le métro, au restaurant, bref, partout, en un dixième de seconde à peine.
L'infirmière m'a montré comment mélanger une des insulines. Je la vois encore faire des grands gestes de bas en haut, et de haut en bas, 10 fois de suite. Ma tête suivait son mouvement de bras et j'ingurgitais les recommandations.
Aujourd'hui encore, instinctivement, je répète les mêmes mouvements pour bien mélanger le produit. Hier soir, le Prince m'a demandé si je comptais m'inscrire dans un club de majorettes…
Aaaah, y'a pas à dire, cet homme-là, il sait parler aux femmes…
Je me revois, il y a des années maintenant, face à une infirmière du service de diabétologie d'un grand hôpital bruxellois. Cette femme avait pour mission de recevoir les nouveaux patients et leur apprendre à gérer leur maladie, en pratiquant plusieurs injections quotidiennes et en adaptant leur régime alimentaire.
Je n'ai eu aucun mal à comprendre comment je devais me nourrir, pourquoi certains aliments m'étaient interdits et quelles seraient les conséquences d'un écart. Mais lorsqu'il a fallu passer aux choses sérieuses, comprenez s'injecter de l'insuline, une grosse bouffée d'angoisse m'a fait éclater en sanglots. J'étais confrontée à la seringue, alors que je tombais dans les pommes à chaque prise de sang. Je réalisais enfin que mon quotidien allait être différent, plus contraignant. Je devais lâcher prise.
L'infirmière connaissait son discours par cœur, on le sentait bien, elle récitait son texte, telle une mauvaise institutrice. Je séchais mes larmes en l'écoutant consciencieusement, presque religieusement. Passer à l'acte fut difficile, ma main tremblait, refusait de m'obéir, les larmes qui coulaient sur les cuisses m'empêchaient d'y voir clair.
Les premières injections se sont faites à l'écart, je devais me concentrer, réfléchir, ne pas me tromper, me calmer, respirer, et vaincre cette peur de me piquer. Quelques semaines plus tard, je me piquais dans le bus, dans le métro, au restaurant, bref, partout, en un dixième de seconde à peine.
L'infirmière m'a montré comment mélanger une des insulines. Je la vois encore faire des grands gestes de bas en haut, et de haut en bas, 10 fois de suite. Ma tête suivait son mouvement de bras et j'ingurgitais les recommandations.
Aujourd'hui encore, instinctivement, je répète les mêmes mouvements pour bien mélanger le produit. Hier soir, le Prince m'a demandé si je comptais m'inscrire dans un club de majorettes…
Aaaah, y'a pas à dire, cet homme-là, il sait parler aux femmes…
jeudi 13 décembre 2007
Relooking !
Ambiance de fête oblige, la Mémère change de coupe, euh, non, de déco ... preuve que cet endroit complètement virtuel fait entièrement partie de mon quotidien. J'ai posé le sapin dans le salon et je me suis dit que ce serait bien de décorer aussi chez la Mémère.
Du coup, entre 2 lessives, 1 minestrone et quelques tentatives de mini-muffins au chocolat pour l'anniversaire de MM1, je me suis lancée. Ca change, non ? Ca vous plaît ?
Du coup, entre 2 lessives, 1 minestrone et quelques tentatives de mini-muffins au chocolat pour l'anniversaire de MM1, je me suis lancée. Ca change, non ? Ca vous plaît ?
mercredi 12 décembre 2007
Les nouveaux pauvres
30 minutes passées à attendre mon tour à la Poste pendant mon heure de table auront eu raison de ma bonne humeur.
Claudy et Jany sont venues ensemble poster leur envoi recommandé et attendent juste devant moi, trouvant le temps certainement moins long que moi, à partager leurs expériences de vie et leurs goûts pour les belles choses …
Ainsi, Claudy s'extasie sur sa maison fraîchement redécorée de sapins clignotants, de guirlandes lumineuses sur le contour de chaque fenêtre, sur les 50 motifs "qui brillent" achetés et aussitôt collés partout partout partout. Je m'imaginais, l'écoutant, un lieu scintillant, coloré, bruyant, où le kitsch rime avec le "kling", où l'écœurement vous embrasse dès le premier pas franchi dans la maison.
Jany, elle, s'est un peu plaint du coût de la vie qui augmente, du prix des pâtes qui vont devenir un plat de luxe, du fromage râpé qui n'est plus en promotion, de la sauce tomate en boîte qui ne se vend plus moins cher par 6.
Claudy et Jany avaient certes des sujets de préoccupation différents, mais se sont retrouvées, amies de cœur, dans la magie de la fête de Saint-Nicolas, leurs enfants tous choyés de consoles "réservées-fin-novembre-parce-qu'en-rupture-de-stock", de lecteur-graveur-enregistreur-disque-dur-externe pour mettre sous la télé reçue il y a 2 mois à son anniversaire, de jeux en tous genres allant du PC sur ladite console, en passant par la télé. Faut bien les occuper, hein, a dit Claudy. Puis, avec les colis de nourriture, ça ira quand même pour boucler la fin du mois, vu que l'électricité, c'est le centre d'aide qui en paye la plus grosse partie. Enfin, y'a plus qu'à espérer que la paroisse nous file du foie gras dans le panier, parce que le pâté de l'année dernière, merci bien !
Puis, le téléphone portable de Jany a sonné. Et à voir le condensé de technologies qu'elle tenait à la main, j'ai compris pourquoi, pour quoi, pour qui je payais des impôts. Et après, on nous parle de la gestion des priorités. J'ai eu du mal à avaler mon repas, ce midi, peur de m'étrangler tellement j'avais les boules…
Claudy et Jany sont venues ensemble poster leur envoi recommandé et attendent juste devant moi, trouvant le temps certainement moins long que moi, à partager leurs expériences de vie et leurs goûts pour les belles choses …
Ainsi, Claudy s'extasie sur sa maison fraîchement redécorée de sapins clignotants, de guirlandes lumineuses sur le contour de chaque fenêtre, sur les 50 motifs "qui brillent" achetés et aussitôt collés partout partout partout. Je m'imaginais, l'écoutant, un lieu scintillant, coloré, bruyant, où le kitsch rime avec le "kling", où l'écœurement vous embrasse dès le premier pas franchi dans la maison.
Jany, elle, s'est un peu plaint du coût de la vie qui augmente, du prix des pâtes qui vont devenir un plat de luxe, du fromage râpé qui n'est plus en promotion, de la sauce tomate en boîte qui ne se vend plus moins cher par 6.
Claudy et Jany avaient certes des sujets de préoccupation différents, mais se sont retrouvées, amies de cœur, dans la magie de la fête de Saint-Nicolas, leurs enfants tous choyés de consoles "réservées-fin-novembre-parce-qu'en-rupture-de-stock", de lecteur-graveur-enregistreur-disque-dur-externe pour mettre sous la télé reçue il y a 2 mois à son anniversaire, de jeux en tous genres allant du PC sur ladite console, en passant par la télé. Faut bien les occuper, hein, a dit Claudy. Puis, avec les colis de nourriture, ça ira quand même pour boucler la fin du mois, vu que l'électricité, c'est le centre d'aide qui en paye la plus grosse partie. Enfin, y'a plus qu'à espérer que la paroisse nous file du foie gras dans le panier, parce que le pâté de l'année dernière, merci bien !
Puis, le téléphone portable de Jany a sonné. Et à voir le condensé de technologies qu'elle tenait à la main, j'ai compris pourquoi, pour quoi, pour qui je payais des impôts. Et après, on nous parle de la gestion des priorités. J'ai eu du mal à avaler mon repas, ce midi, peur de m'étrangler tellement j'avais les boules…
lundi 10 décembre 2007
Droits et devoirs des hommes
Cendrillon pénétra une nouvelle fois dans le château de Blanche-Neige. Elle connaissait le chemin par coeur jusqu'au Miroir. Ce soir, elle avait besoin d'y voir plus clair, ses émotions l'empêchant de réfléchir et de comprendre.
- Miroir, cela fait plus de 2 ans que cette femme est arrivée au village, et elle ne sort presque pas, les gens la disent sauvage, son regard est si triste, son pas si craintif, son corps si effacé. Comment faire pour m'en approcher ? Toutes mes tentatives sont restées vaines...
- Cendrillon, approche... Cette femme fuit son passé, elle survit dans un corps qui ne lui appartient plus, croit-elle. Elle a perdu sa confiance dans le monde. Là où nous rassurons notre enfant qui pleure sa douleur de notre arrivée imminente pour le prendre dans nos bras, elle a hurlé sa détresse mais personne ne l'a entendue, personne ne pouvait l'entendre. Elle a enduré des douleurs que je ne saurais te décrire, parce qu'il n'y a pas de mots pour ça, ce sont des expériences qui se vivent, mais qui ne se disent pas, sans quoi on risquerait de tourner en rond, de métaphore en métaphore, sans toucher le vrai, sans dire avec les bons mots.
Son esprit s'est certainement déconnecté de la réalité pour survivre, son corps s'est anesthésié lui-même, produisant ses propres hormones pour lutter contre une telle monstruosité.
Cendrillon, elle aurait dû mourir, tu comprends ? Lorsque ses bourreaux se sont débarrassés de son corps, ils la pensaient certainement morte, mais un tout petit filet d'air la maintenait en vie. Le hasard a voulu qu'un anonyme l'a trouvée, a appelé les secours et ce geste l'a sauvée.
Cendrillon, cette femme a été torturée. La souffrance morale du viol subi fait pâle figure à côté de ce sentiment d'aliénation qui l'étreint aujourd'hui. Elle est devenue étrangère aux autres et à elle-même.
Tu comprends Cendrillon, que cette femme ne peut pas te sourire et attraper cette main que tu lui tends, elle n'est plus en mesure de comprendre ta démarche. Elle a réintégré le monde des vivants alors que son âme a rejoint les morts... Je suis désolé, Cendrillon, je comprends ta déception.
- Merci, Miroir. J'ai besoin de temps pour digérer cette histoire, mais je ne peux concevoir de rester là, immobile et figée. Cette femme a un prénom, je ne le connais pas, mais je le trouverai et je le lui ré-apprendrai. Et si elle n'attrape pas ma main, ce n'est pas grave, l'important, c'est qu'elle reste tendue. Cette femme a certes le droit à son statut de victime, mais nous, on a le devoir de la respecter, de l'écouter, de l'empêcher de se noyer.
- Cendrillon, bon nombre de torturés se sont noyés...
dimanche 9 décembre 2007
Le sapin
Nous y voilà, le jour J est arrivé, Mémère a planifié la décoration du sapin pour aujourd'hui. Encore fallait-il trouver le sapin...
La télé ne cesse de nous rabâcher les oreilles avec la hausse des prix des sapins. Sauf que tous les prix augmentent, en premier ceux des produits sur lesquels on ne peut faire l'impasse. Le sapin, lui, n'est pas une denrée de première nécessité, et je peux m'en passer. Le Prince, lui, se serait bien contenté d'un sapin artificiel, mais malgré mon côté écolo, je ne peux m'y résoudre.
Hier, nous avons regardé ça et là, le prix des sapins, et nous en avons conclu que si certains s'en mettaient pleins les poches, d'autres restaient raisonnables dans leurs prix. Ce matin, j'avais prévu d'aller voir notre pépiniériste, tôt, pour être sûre d'en avoir un.
Tôt, c'est tout relatif. MM2 a fait toute sa nuit, sans se réveiller, sans broncher, sans se retourner. Vers 7h30, j'ai même été submergée par une bouffée d'angoisse, l'imaginant sans vie dans son lit. Je me suis précipitée dans sa chambre, et ma présence l'a réveillée. MM1 regardait les dessins animés dans notre lit et MM2 est venue redormir avec nous une bonne heure. Levés à 8h30 un dimanche, c'est suffisamment rare que pour justifier cette tranche de vie passionante.
A 10h15, j'arrive chez le pépiniériste. 3 voitures sont garées devant, et l'immense endroit où sont normalement stockés les sapins, est vide. Je rentre et demande innocemment où sont les sapins, "des fois que j'aurais pas vu qu'il n'y en avait plus". Ils arrivent à 10h30, madame, me dit-on. Alors j'attends, et j'entends la dame donner aux clients qui téléphonent la même information. Le téléphone ne cesse de sonner, et plus il sonne, plus la voix de la dame se fait hésitante, et je comprends, qu'hier, le camion qui devait être chargé de sapins est arrivé, en retard et vide.
Incapable d'attendre, je ressors et commence un tour de la pépinière. Je découvre alors quelques sapins, payés et réservés, et un tas de tout petits sapins, plutôt amochés. Il me reste du temps et je décide de jeter un coup d'oeil, on ne sait jamais. J'ai bien fait, parmi ces sapins "oubliés", j'ai dégoté ce qu'il me fallait, un bon sapin bien proportionné, avec une étiquette indiquant 1,50 m, mais qui, à vue de nez, faisait bien un petit 2 mètres.
Ni une, ni deux, payé, embarqué, à l'aide de l'apprenti bien gentil qui n'a pas inventé le fil à couper le beurre, mais qui a finalement réussi à me clouer un pied dans mon beau sapin, roi des forêts...
L'histoire est d'une banalité effarante, et elle aurait pu s'arrêter sur cette fin heureuse. Mais ce serait mentir. "Suroccupée" à faire 36 choses à la fois, et désireuse que tout soit fait en 2 temps 3 mouvements, décorer le sapin, activité que j'adore, a pris une tournure nettement moins festive.
Il était l'heure de préparer à manger.
MM2 avait faim, était fatiguée, et avait peur du sapin.
MM2 ne voulait rien d'autre que mes bras.
MM1 voulait décorer le sapin avec moi mais trouvait "joli" de mettre toutes les boules sur la même branche.
MM2, qui avait finalement adopté l'intrus, otait chaque boule que sa soeur venait de mettre.
Je me suis énervée sur tout le monde, y compris sur le Prince qui n'avait rien fait.
Moralité : dormir 8 heures ne me réussit pas.
vendredi 7 décembre 2007
Le corps et l'oreille
Pendant ma petite enfance, j'ai vécu dans le raisonnement, dans la logique, dans le concret, dans les faits. "J'ai mal au ventre", ça voulait dire "j'ai mangé un truc qui ne passe pas", ou "j'ai trop mangé, ou pas assez", mais certainement pas "j'ai peur", "j'angoisse", "je stresse".
Adolescente, ce corps qui me semblait si étranger m'a profondément troublée, au point de me faire perdre toute confiance en mon sacro-saint raisonnement. "J'ai mal au ventre", ça ne voulait plus rien dire, les possibles étant tellement grands que je me noyais dans les incertitudes.
Il m'aura fallu attendre l'âge adulte pour pouvoir faire la paix avec ce corps, et accepter qu'il ait son mot à dire. Le résultat n'a pas tardé, il s'est libéré de nombreuses années de prison. Si aujourd'hui, j'accepte d'écouter ce qu'il a à me dire, j'ai encore du mal à lui obéir, je voudrais pouvoir avoir le dernier mot. Disons que je garde une oreille attentive.
Hier soir, MM2 était surexcitée, elle ne voulait rien, était fatiguée et pleurnichait tout le temps. Après avoir passé de longues minutes à chercher ce qui pourrait la calmer, j'ai fini par l'allonger et poser mes mains sur ses cheveux. Je lui ai alors raconté ses premières heures de vie, ces premiers instants volés, où tout nouveau-né aspire à rester tout contre sa mère et prolonger cet état de grâce pour pallier au choc violent et froid de la naissance et du passage du monde aquatique au monde aérien. Je lui ai chuchoté combien ces 24 heures de séparation resteraient gravées dans nos corps en plus de torturer mon esprit. Je lui ai murmuré qu'il était temps de faire la paix avec ça, qu'elle et moi, on avait tissé des liens au-delà des mots, au-delà des souvenirs. MM2 a fermé les yeux et s'est calmée quasiment instantanément.
Est-ce le son de ma voix et mes mains posées sur ses cheveux qui l'ont ainsi calmée ? Possible. Mais l'histoire de la maman chat qui était partie chasser la souris, j'avais essayé de la lui raconter sur le même ton, et son trouble allait grandissant.
Après tout, peut-être MM2 n'aime-t-elle pas les chats...
jeudi 6 décembre 2007
Soirée XX
Quand on met autour d'une table quelques nanas, qui viennent d'horizons différents, qui ne se ressemblent pas forcément, ont ou non des enfants, travaillent ou ne travaillent pas, divorcées ou toujours mariées, leurs différences n'ont aucune importance.
Il est par contre étonnant de constater que ces filles auront toujours un truc à dire, ou à redire, se raconteront avec le même fou rire un souvenir d'enfance, du genre "ma première honte devant mon mec", partageront moultes conseils sur la bobologie de leurs enfants, échangeront leurs vues sur l'éducation des mêmes rejetons et continueront à comparer la répartition des tâches ménagères au sein d'un couple moderne où homme et femme travaillent.
Drôle d'image que ces 4 ou 5 femmes au restaurant, maudissant le nombre de calories qu'elles ingurgitent, et savourant le plaisir de se retrouver "entre femmes", sans leurs hommes, et d'imaginer ces derniers gérant de main de maître la maisonnée endormie.
Mais à vouloir être trop gourmande, tant en plat qu'en dessert, on se doit d'assumer les lendemains de fête au boulot. Je vais l'avouer, ce matin, après seulement 3 bonnes heures de sommeil, j'ai eu un mal fou à trouver le gros bouton qui sert à allumer mon PC.
Il est par contre étonnant de constater que ces filles auront toujours un truc à dire, ou à redire, se raconteront avec le même fou rire un souvenir d'enfance, du genre "ma première honte devant mon mec", partageront moultes conseils sur la bobologie de leurs enfants, échangeront leurs vues sur l'éducation des mêmes rejetons et continueront à comparer la répartition des tâches ménagères au sein d'un couple moderne où homme et femme travaillent.
Drôle d'image que ces 4 ou 5 femmes au restaurant, maudissant le nombre de calories qu'elles ingurgitent, et savourant le plaisir de se retrouver "entre femmes", sans leurs hommes, et d'imaginer ces derniers gérant de main de maître la maisonnée endormie.
Mais à vouloir être trop gourmande, tant en plat qu'en dessert, on se doit d'assumer les lendemains de fête au boulot. Je vais l'avouer, ce matin, après seulement 3 bonnes heures de sommeil, j'ai eu un mal fou à trouver le gros bouton qui sert à allumer mon PC.
mercredi 5 décembre 2007
Dodo l'enfant do
Petite, je n'ai jamais aimé l'heure du coucher. Mes parents s'acquittaient de cette tâche avec impatience et ont vite fait de nous laisser nous gérer, seuls, mon frère et moi. Les histoires du soir se résumaient souvent à "prends un livre et lis-le dans ton lit" et le bisou se donnait du bout des lèvres en un millième de seconde.
Je me souviens encore aujourd'hui la difficulté immense que j'avais à trouver le sommeil, toute concentrée que j'étais à revivre mes journées de l'intérieur, à refouler les émotions, à craindre le lendemain, à taire mes questionnements.
Seule dans mon beau lit de princesse, je me relevais souvent sur la pointe des pieds, et allais m'asseoir en haut des escaliers pour écouter les bruits de la maison : la télévision, les machines à laver le linge ou la vaisselle qui tournaient, ma mère qui repassait, ou qui téléphonait, les pas, les voix de mes parents mais surtout, je tendais l'oreille lorsque je les entendais se disputer. Mon coeur se mettait alors à battre violemment, et des bouffées d'angoisse me figeaient sur place. Il fallait que j'entende le bruit d'une porte qui s'ouvre et qui annonçait la venue proche de l'un de mes deux parents pour que je file me recoucher et m'endorme finalement sur mon oreiller rempli de larmes.
Le lendemain, j'observais de part et d'autre et attendais le moment fatidique où nous serions réunis, mon frère et moi, pour entendre la sentence tomber : "les enfants, nous allons divorcer". Toutes mes copines de classe avaient des parents "divorcés", les miens allaient forcément y passer. Mais les choses finissaient par reprendre leur cours habituel, et je repoussais l'angoisse de la séparation à plus tard. Je me recouchais seule, lisais mon livre seule, restais seule aussi avec mes doutes et mes peurs.
Maman à mon tour, j'ai découvert la magie de ces instants uniques du soir. Et lorsque MM1 me chuchote des secrets dans l'oreille et me demande de rester "pas loin un petit peu", je me revois à son âge, désirant plus que tout me laisser tomber dans les bras de Morphée, sereine et apaisée par la présence rassurante de ma mère.
lundi 3 décembre 2007
De bonne guerre ?
Chez nous, on prône la non-violence, le dialogue plutôt que les coups, le partage plutôt que la division, bref, le Prince et moi passons un temps précieux, comme de nombreux parents, à faire l'éducation de nos enfants.
Application:
MM2 hurle au salon. MM1 l'ignore superbement et vaque à ses occupations. J'arrive en demandant à mes filles la raison de ce hurlement digne d'un oeil crevé, d'une touffe de cheveux dans la main, d'une fracture béante...
MM1, sûre d'elle, m'annonce alors qu'elle a frappé sa soeur, et semble n'avoir aucun remords. Avant même que je n'aie eu le temps de lui demander pourquoi elle avait agi ainsi, elle m'a expliqué que sa soeur l'avait frappée plusieurs fois, et qu'en fin de compte, elle lui avait dit qu'on ne pouvait frapper (avec le doigt et une grosse voix de petite fille de presque 3 ans !) et finalement, s'était défendue, en lui rendant ses coups.
Et la malheureuse hurlait comme une possédée.
J'ai souri devant une telle franchise, et sans le lui dire, j'ai approuvé, parce que franchement, MM2, elle charrie, elle frappe, elle mord, elle pince, vaut mieux pas se trouver sur son chemin !
dimanche 2 décembre 2007
Au détour d'une nouvelle
Dois-je le considérer comme à moitié vide, ou à moitié plein, ce verre de whisky que je viens de me servir ? Dois-je le boire cul sec ou bien le siroter à mon aise ? Pour une fois que je bois d'ailleurs...
Je savais, je le savais que quelque chose de grave allait se passer. Je savais, lorsque la secrétaire du toubib m'a dit, au téléphone, d'une voix qu'elle voulait le plus neutre possible, qu'il fallait que je revienne le plus vite possible, que ma vie allait prendre un virage à 180 degrés.
Les mots du spécialiste se sont emmêlés très vite, son diagnostic sans appel, son air désolé, les traitements palliatifs, les chimio de confort, les hospitalisations longue durée, tous ces mots étaient restés en suspens, quelque part dans l'atmosphère, entre la sphère médicale et ma sphère à moi. Un puzzle où aucune pièce n'avait rejoint l'autre, un gouffre entre chaque mot, un vide entre chaque image, l'hébétude la plus complète.
Je suis sortie du CHU, il faisait plein soleil. La luminosité m'a donné le vertige, cette impression que le sol se dérobait sous mes pieds, de perdre le contrôle, des images de châteaux construits à l'aide de jeux de cartes mises les unes sur les autres en équilibre qui s'écroulent parce qu'une porte vient de s'ouvrir, un peu trop brusquement.
J'ai ouvert la portière de la voiture, et me suis installée au volant de ma voiture. J'ai rallumé mon téléphone et j'ai regardé si de nouveaux messages étaient arrivés, pendant les 2 heures qu'avait duré le rendez-vous. Rien. L'homme que j'ai épousé il y a vingt ans déjà ne trouvait pas le temps long et devait être occupé à racheter telle entreprise ou à négocier un contrat en or, cette fois-ci. Penser à cette famille pour laquelle j'avais tant investi, et tant sacrifié, m'enfonçait davantage dans un état de torpeur.
Je suis rentrée à la maison, j'ai appelé le boulot pour les prévenir que je ne viendrai plus de la semaine, et me suis servie un verre.
Dans quelques heures, ils vont tous débarquer, enfants, parents, oncles, tantes et cousins, pour fêter les 18 ans de mon fils, et il va falloir faire bonne figure.
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